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Si vous avez déjà eu l’impression comme moi de ne pas être à votre place à votre travail, de vous sentir un·e imposteur·e, vous allez savoir de quoi je parle.

Ces trois dernières années, j’ai fait partie d’un comité chargé d’expertiser, de classer et d’attribuer des financements à des projets de recherche. Dès la première table ronde, j’ai eu l’impression très nette de ne pas être à ma place. Alors que tous autour de la table se présentaient et donnaient leurs principales responsabilités, je me suis demandée ce que j’allais bien pouvoir dire à part mon nom. Des tas de pensées ont commencé à se bousculer dans ma tête : tu n’es pas à ta place, il devait leur manquer une femme, cherchez l’erreur (c’est moi ! ), tu vas devoir évaluer des projets de chercheurs beaucoup plus forts que toi et c’est ridicule, tu crois vraiment que c’est une bonne idée d’avoir accepté ? , ça va être l’enfer, tu vas te ridiculiser dès que tu vas ouvrir la bouche… Et évidemment, toutes ces pensées et les émotions qu’elles provoquaient en moi ne m’aidaient pas vraiment à me concentrer et à donner le meilleur de moi-même. Et c’est pourtant ce que je souhaitais faire de tout mon cœur : non pas m’apitoyer sur moi-même mais servir ma communauté en menant des évaluations de la manière la plus juste possible.

Si vous avez déjà eu l’impression comme moi de ne pas être à votre place à votre travail, de vous sentir un·e imposteur·e, vous me comprenez. Toutes ces pensées qui vous paraissent des faits indiscutables et qui encombrent votre esprit vous font vous sentir très mal, vous tétanisent et vous empêchent de travailler correctement. Bien sur ces pensées ne viennent pas de nulle part : votre éducation, les messages véhiculés par la société dans son ensemble et la culture de votre travail y ont un grand rôle. Ces aspects sociologiques et politiques sont cruciaux et méritent qu’on s’y intéresse. Mais en attendant de changer le monde, que pouvez-vous faire sur un plan personnel ?

La solution, c’est tout d’abord d’être conscient·e de ce que vous pensez. Tout d’abord, quels sont les faits objectifs ? Qu’est-ce que vous vous dites exactement ? Qu’est-ce qui vous passe dans la tête dans cette situation ? Demandez-vous ensuite : comment cela me fait me sentir, quelle émotion cette pensée produit-elle ? Comment je me comporte dans cette situation quand je me sens comme ça ? Quelle est la conséquence de ce comportement dans mon travail ? En quoi cela prouve t-il mes pensées ?

Cette partie là n’est pas très agréable, car vous vous confrontez aux pensées qui vous font souffrir et que vous préféreriez ignorer. Imaginez un grenier où vous n’allez pas souvent mais que vous voulez nettoyer. Il faut commencer par y aller et allumer la lumière pour voir l’ampleur du travail à accomplir. C’est ce que vous faites en observant vos pensées ! Cette première étape de prise de conscience est indispensable. C’est sale, c’est encombré, il y a du travail !

Lors de la première table ronde du comité, alors que mes collègues se présentaient, j’ai pensé « Je ne suis pas à ma place » et je me suis sentie honteuse. Quand j’ai honte, je me cache, je rentre dans ma coquille, je ne parle pas, je me fais toute petite, et en me comportant comme cela dans ce comité je n’aurais pas fait mon travail, me prouvant à moi-même que je n’étais pas à ma place !

Maintenant que la lumière est allumée dans votre grenier et que vous voyez ce qui se passe dans votre tête, que voulez-vous faire ? Commencez par vous demander ce que vous voulez accomplir dans votre travail, et comment vous devez agir pour atteindre ce but. Comment devez-vous vous sentir pour agir de la sorte ? Quelle pensée vous permet de ressentir cette émotion ? Pour que cela fonctionne cela doit-être une pensée que vous croyez.

Mon but lors de ma participation au comité était d’offrir l’évaluation la plus juste possible à mes collègues. Pour cela il fallait que je fasse de mon mieux pour avoir un avis sur les dossiers déposés et que je participe aux discussions pour que nous puissions collectivement arriver à un consensus éclairé. J’ai donc choisi de penser que j’étais là pour faire de mon mieux et cela m’a rendue déterminée.

Ce travail ne va pas vous permettre de magiquement ne plus vous sentir un·e imposteur·e en toute situation. Mais il peut vous permettre, comme il l’a fait pour moi, de prendre du recul et de ne plus être une victime du syndrome de l’imposteur : il ne vous empêchera plus de faire votre travail et d’atteindre vos buts.

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1 Comment

  1. « Faire de son mieux »…
    C’est clairement la bonne idée… où qu’on soit, quoiqu’on fasse, quelques soient les personnes présentes…
    Merci pour cette petite « vignette » éclairante.


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